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Atelier de Recherche et de Création (ARC) :
Art invisuel
La créativité au sein des modèles socioéconomiques

Vue depuis le 8ème étage de l'Académie Libanaise des Beaux-Arts (ALBA - UOB), où se trouve l'ARC Art Invisuel du Centre de Recherche et de Création.

Code
ARC1041-1

 

Enseignant-chercheur
Ricardo Mbarkho, PhD
ricardombarkho@alba.edu.lb

 

Date du début de cet ARC
Septembre 2024

 

Descriptif
Cet Atelier de Recherche et de Création s'inscrit dans un contexte dynamique de redéfinition constante de l'art, marqué par des ruptures majeures. Il est nécessaire de réexaminer la place de l'œuvre d'art à la lumière de la quête de liberté et de la possibilité de l’émergence de nouveaux langages pour l’art.

Dans cette perspective, la recherche menée au sein de cet ARC se doit d’explorer la possibilité d'une œuvre d'art libérée du modèle socioéconomique du marché de l’art sans pour autant compromettre sa complétude.

La problématique centrale réside dans l'interaction entre l'art et les pratiques dites non artistiques dans l’idée d’une évolution socioéconomique pour l'art. Cet ARC se concentre sur cette interaction, cherchant à éclairer comment elle peut façonner de nouvelles perspectives pour l'art dans un contexte sociétal en mutation, où nous observons une redondance de plus en plus accentuée des formes d’art, jusqu’à une certaine uniformisation.

L’hypothèse de recherche avance que l'utilisation de modèles socioéconomiques existant en dehors du domaine de l’art comme support de l'œuvre favorise son évolution et sa libération des contraintes imposées par le marché de l'art.

Cette hypothèse trouve sa justification dans l'évolution du statut de l'œuvre face au pouvoir contraignant du marché de l'art capitaliste depuis le début du XIXe siècle. Elle pose la question de l'impact de l'œuvre dite « invisuelle », suggérant que concevoir l'œuvre en dehors du territoire menacé par le marché de l'art pourrait être une voie prometteuse pour favoriser son développement dans un environnement plus libéré et créatif. L’ARC émet l’hypothèse qu’après les limites organisationnelles de l’art visuel, d’autres territoires artistiques restent à explorer.

 

Méthode

  • Cadre de recherche et de création : La base théorique et conceptuelle de la recherche dans cet ARC trouve son ancrage dans l'évolution de l'histoire de l'art, des avant-gardes du début du XXe siècle à l’art invisuel dont l’avènement se situe à la fin de ce siècle. L’art invisuel cherche à théoriser l'art à l’extérieur du modèle socioéconomique de l’art visuel.
  • Techniques de collecte de données : La collecte de données s'effectue à travers des entretiens avec des artistes et d’autres professionnels issus de diverses disciplines. Elle inclut des lectures et des observations d'événements ou actions artistiques, ainsi que des analyses approfondies de pratiques invisuelles. « Pratiques invisuelles » et non pas « œuvres invisuelles » parce qu’il est probable que dans le champ de l’art invisuel il n’y ait plus d’œuvre d’art dans le sens où nous l’entendons, qu’elle soit matérielle ou immatérielle.
  • Analyse des données : L'analyse des données vise à évaluer dans quelle mesure les pratiques examinées répondent à la question centrale de l'art, axée sur la quête de la liberté et de la vérité. Mais aussi dans quelle mesure ces pratiques amènent à des nouveaux langages et formes pour l’art. Elle explore la manière dont ces pratiques évoluent au sein de modèles socioéconomiques considérées comme non artistiques, afin de confirmer la validité de notre hypothèse. Cette approche globale permet de contextualiser et d'appréhender les multiples dimensions d’un art socioéconomique, ou encore, d’un art invisuel.

 

Résultats attendus
  • Identification de pratiques dites invisuelles, qui peuvent se présenter en tant qu'artistiques, évoluant dans des modèles organisationnels autres que le modèle socioéconomique du marché de l’art visuel ;
  • Rédaction d'articles visant à enrichir la littérature d’un art socioéconomique, invisuel ;
  • Dynamiques d’ouverture vers la recherche ;
  • Production de projets d’art socioéconomique, invisuel.

 

Modalités d’évaluation

  • Présence
  • Suivi du cycle de conférences du CRC
  • Rédaction d’article de recherche
  • Projet final

 

Références

Livres :

  • ARDENNE, Paul (2023). L'art en joie. Esthétiques de l'humanité joyeuse. Le Bord de l'eau.
  • MILA, Corina Chutaux (2021). Esthétique de l’art invisuel. Éditions du Panthéon. Français.
  • MOINEAU, Jean-Claude (2023). Pour un art invisuel, inouï, inesthétique, inœuvré, pluriel..., Editions Biennale de Paris, 2023, 278 pp. Français

Catalogues :

  • COLLECTIF. Catalogue de la XIVe Biennale de Paris. Préface par Paul Ardenne. Éditions Biennale de Paris, 2004, 548 pp. Français, anglais, allemand.
  • COLLECTIF. Catalogue de la XVe Biennale de Paris, Editions Biennale de Paris, 2007, 1200 pp. Français.

Articles :

Vidéo :

Evénements :

 

Matériel requis par l’étudiant.e
Ordinateur ou tablette

 

Plan d'action
Phase 1 : Observation du terrain artistique et non-artistique
Phase 2 : Analyse d’œuvres et hypothèses d’un art socioéconomique
Phase 3 : Rédaction d’article et pratiques créatives
Phase 4 : Évènement et publication

 

Calendrier prévisionnel

Séance 1 :

  • Révision et visionnage des références existantes, en mettant l'accent sur les travaux interdisciplinaires pertinents.
  • Formulation des questions de recherche interdisciplinaires.
  • Établissement de la problématique dans le contexte de l'interdisciplinarité artistique.
  • Rencontre·s
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures
  • Travail personnel : 8 heures

Séance 2 :

  • Raffinement des questions de recherche, en explorant les connexions entre les différentes disciplines.
  • Élaboration de l'hypothèse de recherche intégrant des éléments théoriques et pratiques.
  • Rencontre·s
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures
  • Travail personnel : 8 heures

Séance 3-4 :

  • Collecte de données : entretiens avec des artistes et professionnels de différentes disciplines.
  • Prise de notes et enregistrement des entretiens pour une analyse approfondie.
  • Observations d'événements artistiques interdisciplinaires, en mettant l'accent sur les interactions et les influences réciproques.
  • Documentation des observations et relevé des éléments pertinents pour nourrir la recherche théorique et pratique.
  • Rencontre·s
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures par séance
  • Travail personnel : 8 heures par séance

Séance 5-6 :

  • Analyse des données collectées : regroupement des thèmes et des motifs émergents en considérant les aspects interdisciplinaires.
  • Interprétation des résultats par rapport à l'hypothèse de recherche, en prenant en compte les apports des différentes disciplines en question.
  • Identification des liens entre les données théoriques et pratiques pour une compréhension globale.
  • Réflexion sur les implications interdisciplinaires des résultats et leur impact sur la création artistique.
  • Synthèse des résultats de l'analyse et discussion des implications pour l'art, en mettant en évidence les synergies et les défis liés à l'interdisciplinarité artistique.
  • Résidence d'art invisuel
  • Rencontre·s
  • Contrôle mi-parcours
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures par séance
  • Travail personnel : 8 heures par séance

Séance 7-8 :

  • Présentation des projets de recherche et/ou de création de chaque étudiant.
  • Production des articles de recherche théorique.
  • Production des œuvres de création pratique.
  • Rencontre·s
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures par séance
  • Travail personnel : 8 heures par séance

Séance 9-10 :

  • Finalisation du projet de recherche : révision, édition et préparation pour la présentation ou la publication, en mettant en valeur les contributions de l'interdisciplinarité à la recherche théorique et à la création pratique.
  • Rédaction de la conclusion du projet de recherche en soulignant les découvertes interdisciplinaires et les recommandations pratiques pour soutenir l'interdisciplinarité artistique.
  • Rencontre·s
  • Rendu final
  • Lectures : [référence bibliographique]
  • Nombre d’heures : 3 heures par séance
  • Travail personnel : 8 heures par séance

 

Langue d'enseignement
Français (et anglais si besoin)

 

Répartition globale en heures
Heures d’enseignement/recherche sur place = 30 heures
Travail personnel = 80 heures

 

Effectif
15 étudiants en première année de Master

 

Biographies


Photo par Ayoub Bitar
  Ricardo Mbarkho
Enseignant-chercheur principal

Artiste invisuel, Professeur Assistant, Directeur de la Recherche et Directeur du Centre de Recherche et de Création à l’Académie Libanaise des Beaux-Arts (ALBA, Université de Balamand), il explore et théorise les conditions et les mesures esthétiques, économiques, politiques et sociales d’un art qui s’affranchit de l’idée de l’œuvre, du public et du contexte ; un art post-immatériel : sans objet matériel ou immatériel. Dans un idéal type, l’on est dans une recherche-création d’un art sans art, où le support de la pratique artistique devient le modèle socioéconomique lui-meme.

En 1998, il rencontre Alexandre Gurita à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA). Ensemble, ils expérimentent de nouvelles approches artistiques à la fin des années 1990 et au début des années 2000, qui ont plus tard devenues connues sous le nom d’art invisuel, un genre d’art qui regroupe aujourd’hui un nombre d’artistes et d’institutions partout dans le monde. Quelques projets invisuels expérimentaux : "Pierre Yves Fave Portes Ouvertes", "Autoexposition", "Chacun a de l’art ce que l’art a de lui-même", "Paris Côte Ouest", "Installation d’un radiateur", "Association pour la propriété intellectuelle de l’être sur lui-même".

Ricardo Mbarkho est titulaire d'un doctorat de l'Université Sorbonne Paris Nord ; sa thèse porte sur les mutations des industries culturelles vers les industries créatives, avec un focus particulier sur l'étude approfondie des arts médiatiques. Il est également diplômé de la Faculté des Beaux-Arts et d’Architecture de l’Université Libanaise à Beyrouth, de l’École Supérieure d’Études Cinématographiques à Paris (ESEC), ainsi que de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA) après avoir poursuivi des études en arts des nouveaux médias à la School of Fine Arts de l’Université Carnegie Mellon aux États-Unis.

L’artiste a donné des conférences et menée des ateliers tels à Aix Marseille Université, ANdEA (Strasbourg), ARS Electronica (Linz), ARTos Foundation (Nicosia et Madrid), Ashok Jain Gallery (New York), Biennale de Paris, Ecole nationale d'art de Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-art de Paris, EMAF (Osnabrück), IMéRA (Marseille), Institut Supérieur des Beaux-arts de Sousse, Jeu de Paume (Paris), MUCEM (Marseille), Notre Dame University (Louaize), Transmediale (Berlin), UNESCO (Paris), Université d’Alexandrie, Université Libanaise, Université Saint-Joseph (Beyrouth), et World Summit Contributory Conference on ICT & Creativity (Vienne).

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Photo par Louis Gurita
  Alexandre Gurita
Intervenant principal

Artiste invisuel et Directeur de la Biennale de Paris, créée en 1959 par André Malraux, ministre de la Culture, et de l'École nationale d'art de Paris (ENDA), première école de recherche en art. Après avoir expérimenté de nombreuses formes d'art et constaté que tout avait été fait et refait, il abandonne totalement la production d'œuvres d'art en 1998, estimant qu'elles entravent sa créativité. Cette même année, il rencontre Ricardo Mbarkho à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA). Ensemble, ils ont expérimenté de nouvelles approches artistiques entre 1998 et 2001, aboutissant plus tard à l'art invisuel.

En 1999, Alexandre Gurita affirme que « l'œuvre d'art est une manifestation résiduelle de l'être, ce qui à notre époque est devenu sous-artistique ». En 1999, il crée l'Association pour la propriété intellectuelle de l’être sur lui-même, avec Ricardo Mbarkho, Pierre-Yves Fave et Stéphane Augé, envisageant l'être humain comme une œuvre d'art en devenir. Cette même année il dépose sa vie comme une œuvre d’art auprès de la société Protecréa, spécialisée dans le dépôt des œuvres d’art. Le 23 juin 1999, il présente son mariage comme projet de diplôme de fin d'études à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA), ce qui bouleverse cette école et déclenche des hostilités de la part des enseignants et des tenants de la bien-pensance artistique. Par la suite, Alexandre Gurita réalise que si l'artiste agit en solitaire, il n'a plus la possibilité de créer une forme d’art singulière ni un impact sur la définition de l’art. Il fallait dorénavant agir à plusieurs et sous couvert d'institution. Pour cette raison l’artiste capte la Biennale de Paris en 2000 pour la transformer dans une institution crique, mise au service de toute pratique affranchie du régime normatif de l’art.

En observant des pratiques qui n'entraient dans aucune catégorie d'art existante, il formule en 2004 un terme sur mesure pour les caractériser : l'« art invisuel ». L'art invisuel décrit un genre d'art à part entière, existant autrement que sous forme d'œuvre d'art, matérielle ou immatérielle. Selon l’historien de l’art Éric Monsinjon, l’art invisuel se définit par ce qu’il n’est pas. Une des spécificités de l’art invisuel est de considérer l’écosystème de la pratique comme faisant partie intégrante de celle-ci. En même temps que l’artiste invisuel élabore sa pratique, il conçoit son modèle économique et stratégique, sa terminologie, ses circuits et modes de diffusion, ses publics, sa dimension multimodale, écologique et collaborative. Sa deuxième spécificité consiste à considérer que les artistes peuvent travailler en intelligence collective dans une logique de co-construction, dans une approche horizontale basée sur la non-compétitivité, similaire aux sports d'équipe ou aux groupes de scientifiques travaillant ensemble sur un même projet.

Dans le champ de l’art invisuel, l’artiste explore des axes tels que la captation institutionnelle, l’institution critique, l'économie transversale, la multimodalité, l’horizontalité, la stratégie de l’eau (faire avec), l’asymétrie (se trouver là où on ne s’y attend pas), ainsi que la critique augmentée (agir à plusieurs). La captation institutionnelle désigne l'acte consistant à capter légalement des institutions afin de les transformer en institutions critiques de changement. Les trois captations majeures de l'artiste : la Biennale de Paris (2000), l’Institut des hautes études en arts plastiques (Iheap) (2012), devenu l'ENDA en 2017, et la Revue de Paris (2020). L’artiste considère le système de l’art comme un matériau de travail. Il estime qu’en dehors de l'art en tant que tel, deux facteurs majeurs sont déterminants sur sa définition même : son économie et son enseignement. L’artiste collabore activement avec d’autres professionnels pour faire valoir une nouvelle vision de l’art.

L’artiste a donné des conférences et menée des ateliers tels à l'Académie Libanaise des Beaux-Arts (Beyrouth), Guggenheim Museum de Bilbao (Bilbao), Yale School of Art (New Haven), Apexart (New York), Columbia School of Art (New York), Queens Museum of Art (New York), School of Visual Art (New York), Grand Palais (Paris), Musée d’art moderne de la Ville de Paris (Paris), Palais de Tokyo (Paris) et Paris 1 Sorbonne (Paris).

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  Roxane Vidalon
Conférencière

Directrice de l’IAPI (Institut d’Art Philosophique et Invisuel)

Chercheure en Art Philosophique et Invisuel, artiste philosophale.

Actuellement, elle poursuit un Master en Recherche Esthétique (Philosophie et Psychanalyse de l’art) à l’Université de Montpellier (France). Diplômée de l’École nationale d’art de Paris (ENDA), elle y propose l'ouverture d'une Ligne de Recherche et d'Expérimentation (LDRE) "Socle théorique et philosophique de l'art invisuel" pour l'année 2025.

Auparavant, elle a enseigné la danse contemporaine au Conservatoire de Tarbes (France), avant de se tourner dès 2016 vers les arts visuels (dont le tatouage, et l'illustration). En 2018, elle s'engage pleinement dans les arts plastiques, approfondissant ses recherches et continuant à nourrir une réflexion philosophique. Sa démarche l'avait déjà menée à entreprendre une licence en philosophie (en 2013) dans le but de fusionner pratique artistique et réflexion philosophique. En 2023, Roxane Vidalon décide de mettre de côté la production d’œuvres d’art pour se consacrer à une étude approfondie de l'art, de la matière et de son abstraction. En mars 2024, elle fonde l’Institut d’Art Philosophique et Invisuel (IAPI), dont le lancement public aura lieu la même année. Son dernier article, L’Œufre au Rose, a été publié dans la Revue de Paris (N°54) en février 2024. Sa plus récente conférence sur l’art invisuel, intitulée L'art est-il faux ? L'art invisuel comme réponse, s'est tenue en juillet 2024, lors de la Semaine des Arts de Soueich (Haute-Garonne, Occitanie, France). Récemment, un article mentionnant le travail de l’artiste, Roxane Vidalon, l’art invisuel pour repousser les limites, par Stéphane Boularand, a été publié dans La Dépêche en mai 2024.


Conférence par Roxane Vidalon : Pour un dépassement de l’art : l’Art Philosophique et Invisuel.

Date : Mardi 15 octobre 2024 à 15:30 (heure Beyrouth)
Lieu : En hybride à l'Académie Libanaise des Beaux-Arts
Public : Étudiants en ARC Art Invisuel

Lorsque j’ai compris ce qu’était l’art invisuel, cela m’a semblé être une découverte majeure dans l’histoire de l’art et de l’humanité. Je parle volontairement de découverte car il s’agit enfin d’envisager l’art nettoyé des tous les apparats, fioritures, accidents au sens philosophique, c’est-à-dire tout ce qui peut ne pas être ; en opposition à l’essence, au principe, qui EST, je dirai même qui DEVIENT perpétuellement. L’art n’est pas un tableau, l’art n’est pas une composition musicale, l’art n’est pas une performance, il DEVIENT. Et l’art invisuel en se détachant des concepts d’œuvre et d’objet se rapproche, à mon sens, d’un principe pur de l’art en devenir, du moins il l’interroge, et part à sa rencontre en dehors des sentiers battus et rebattus des arts visuels ou des arts vivants.

J’ai alors entrepris d’explorer plus profondément et selon une méthodologie empruntée à la philosophie, le socle théorique de l’art invisuel. J’ai nommé cette recherche, qui est devenue ma pratique, l’Art Philosophique et Invisuel.

Je considère que l’art invisuel doit franchir un nouveau cap dans son assise et son expansion, il faut même considérer qu’il pourrait alors toucher de manière plus efficace un public hors institutions artistiques, et assurer ainsi sa diffusion et son évidence auprès de la population, de la doxa et de la société. Il s’agit désormais de comprendre que l’art invisuel s’insère dans l’ère noétique dans laquelle l’humanité est entrée depuis le début du XXIème siècle. Les ères modernes et contemporaines de la rationalité, du capitalisme et de l’objet s’achèvent, évoluant vers une ère de la pensée, de la connaissance, des systèmes complexes synergétiques et informationnels. Une ère où les anciens mais persistants modèles socio-économiques seront dépassés.

 

  Gary Bigot
Conférencier

Gary Bigot développe une démarche artistique en considérant que tout est fait, produit et installé sans aucune intervention de sa part. Il est considéré comme un des premiers artistes invisuels. Il adopte dans sa pratique les résolutions radicales suivantes : pas de production par soi-même, pas de promotion par soi-même, pas de profit pour soi-même, pas de propriété à titre personnel. Depuis 1985, son principe de l’hygrométrie est à considérer comme son œuvre. Son fonctionnement spécifique nous renvoie à chacun de nous, sensibles, productifs, connaissant, communicatifs. Il considère celle-ci comme son autoportrait ou encore le « portrait de chacun ». Cet acte-position libérateur lui a permis de considérer radicalement que toutes ses œuvres sont produites et installées, se produisent et s’installent sans son intervention. Produire davantage était pour lui superflu et artistiquement indigne. L’ouverture créée par cette attitude extrême et définitive se révèle insoupçonnée et incite à la réflexion et à la création. Ce qui se passe après coup ne le concerne plus. Il s’installe comme observateur impliqué de son œuvre terminée mais pas clôturée. Il lâche son concept en liberté ainsi que son attitude, et, si le besoin extérieur se manifeste, il autorise chacun à s’en servir, à réaliser des œuvres, expositions, discours, etc., même une commercialisation à leur profit. Et ceci sans son accord ! L'artiste a donné des conférences notamment à l'École nationale d'art de Paris (ENDA), à l'Université de Belval (Luxembourg), et à La Maison Commune (Bruxelles). Gary Bigot a initié la Biennale de Paris au Luxembourg, qui s'est déroulée du premier octobre 2018 au 30 septembre 2020. Intitulée « L’air que je souffle, tu respireras un jour », elle a consisté en une application grâce à laquelle les usagers pouvaient géolocaliser leur souffle sur la mappemonde en soufflant sur un ordinateur ou un smartphone.

 

  Rose Marie Barrientos
Conférencière

Rose Marie Barrientos, docteur en argumentation, examine la possibilité de l’art comme argument en partant d’une perception de l’art comme une forme de pensée, de discours et de connaissance. Plus spécifiquement, elle s’intéresse aux organisations d’artiste (dites « entreprises critiques »), qui constituent le point focal de sa recherche. L’historienne argumentaliste a formulé une méthodologie basée sur l’argumentation, permettant d’écrire l’histoire de l’art avec des instruments empruntés à cette discipline. Son approche s’appuie sur l’analyse des stratégies d’argumentation mobilisées par l’artiste pour donner du sens à son travail plutôt que sur sa production d’œuvres, qu’elle soit de nature visuelle ou invisuelle. Elle privilégie les éléments argumentatifs et la dynamique de l’argument sur la forme et le contenu qui le véhiculent. Elle est intervenante à l’Ecole nationale d’art de Paris (ENDA), l’école de la Biennale de Paris.


Conférence par Rose Marie Barrientos : Les voies de l’argumentation, la raison de l’art.

Date : Mardi 15 octobre 2024 à 14:30 (heure Beyrouth)
Lieu : En hybride à l'Académie Libanaise des Beaux-Arts
Public : Étudiants en ARC Art Invisuel



En se dégageant du principe de la représentation comme ancrage et levier centrale de la création artistique, l’art invisuel introduit un paradigme inédit et encore peu étudié. Comment aborder un art qui se libère du registre sensoriel pour privilégier ce qui relève du fait culturel, philosophique ou politique ? Comment le distinguer de l’art conceptuel et d’autres formes artistiques plus récentes, telle la performance et l’esthétique relationnelle ? Par ailleurs, dès lors que ses praticiens cherchent à s’émanciper du monde de l’art traditionnel – tant sur le plan esthétique qu’institutionnel et économique – on peut s’interroger sur ses modes de diffusion, de réception et d’interprétation. Or, les grilles de lecture et les méthodologies dont dispose l’histoire de l’art s’avèrent insuffisantes pour considérer ces questions. Au cours de ma recherche sur les « entreprises critiques », ce constat a dirigé ma réflexion vers l’argumentation, champ d’étude interdisciplinaire offrant des instruments mieux adaptés à mon analyse.

L’art invisuel appartient à une nouvelle catégorie que je propose ici de déceler en le contemplant comme vecteur d’argumentation au service de l’artiste argumentaliste (néologisme d’Alexandre Gurita). Dans cette configuration, l’art serait une extension de la raison. Envisageant les « entreprises critiques » comme de formes embryonnaires d’art invisuel, je dégage des pistes qui permettront de répondre aux questions posées plus haut, mais ma présentation vise également à fournir quelques repères théoriques et historiques sur l’argumentation, discipline désormais au cœur de mon travail d’historienne de l’art. Ses principes informent mes hypothèses, ce qui me fait penser que ces mêmes principes se trouvent au cœur des pratiques invisuelles.

 

  Éric Monsinjon
Conférencier

Historien de l’art et philosophe, Éric Monsinjon est un spécialiste des avant-gardes artistiques du XXe siècle et de l’art contemporain expérimental. Ses recherches portent notamment sur des mouvements d'avant-garde français, comme le lettrisme et l’Internationale Situationniste. En tant que professeur, il enseigne l’histoire des arts à l’Académie de la Comédie-Française à Paris, l’École nationale d’art de Paris (ENDA), ainsi que dans diverses écoles d’art en France. Il est également le fondateur de « L’Anti-Esthétique », un blog sur Mediapart dédié à la recherche expérimentale en art pour le grand public. Actuellement, il s’attèle à l’élaboration d’une théorie générale sur la formation et la formalisation de nouveaux arts. Il s’agit, par des actions et des moyens appropriés, de transformer consciemment et méthodiquement certaines activités humaines ou certains savoirs non-artistiques en arts autonomes. Il considère que l’acte de création ne doit pas se limiter à l’échelle d’une œuvre d’art, mais doit également s’étendre à l’échelle d’un art. En 2023, il participe, avec José Manrubia et Alexandre Gurita, à la fondation d'un nouvel art : la Corrida Etica.

 

  Corina Chutaux Mila
Conférencière

Doctorante à l’Université de Paris-Saclay, en humanités digitales, elle a enseigné à Sciences Po l’art et la littérature et à la Sorbonne l’informatique appliquée aux sciences humaines. Elle a écrit le premier ouvrage sur l'art invisuel intitulé Esthétique de l'art invisuel, ouvrage de référence paru en 2021 et lancé au Palais de Tokyo en 2022. Elle est l’initiatrice du premier colloque international consacré à l’art invisuel qui s’est déroulé le 17 juin 2022 à La Sorbonne, intitulé L’art invisuel : doxa et paradoxe.


  Paul Ardenne
Conférencier

Paul Ardenne, historien de l'art contemporain, critique et commissaire d'exposition, se consacre à l'exploration de l'art contemporain, avec un intérêt marqué pour les interactions entre l'art, la société et l'environnement. Auteur de nombreux ouvrages influents, il explore des thématiques telles que l'esthétique environnementale, l'art public et la relation entre l'art et l'écologie. Parmi ses publications figurent Art, l’âge contemporain (1997), L’Art dans son moment politique (2000), Un Art contextuel (2002), Extrême – Esthétiques de la limite dépassée (2006), Images-Monde. De l’événement au documentaire (en collaboration avec Régis Durand, 2007), Art, le présent. La création plastique au tournant du 21e siècle (2009), Un Art écologique (2018), et son prochain ouvrage Hors de vue - De l'invisuel et de la minoration physique de l'art prévu pour paraître courant 2024. Paul Ardenne a conçu des nombreuses expositions parmi lesquels Micropolitiques (Magasin, Grenoble, 2000), Expérimenter le réel (Albi-Montpellier, 2001 et 2002) et Working Men (Genève, 2008), La Force de l’art au Grand Palais, à Paris (2006), Pavillon du Luxembourg, 56e Biennale d’art de Venise (2015). Il collabore activement à la Biennale de Paris depuis 2004 et à l’ENDA depuis 2023. Il est le premier théoricien de l’art à avoir écrit sur la Biennale de Paris depuis sa captation par Alexandre Gurita en 2000, avec son texte Expérimenter une biennale, préface du catalogue de la XIVe Biennale de Paris en 2004.

 

  Mariem Memni
Conférencière

Artiste invisuelle et migrologue, Mariem Memni est la Directrice de l'École européenne pour l'intégration des migrants par l'art (EEIMA), basée à Bruxelles. Elle est titulaire d’un Master de l’ISBAS (Institut Supérieur des Beaux-Arts de Sousse, Tunisie) ainsi que d’un DNREA (Diplôme National de Recherche et d’Expérimentation en Art) de l'ENDA (École nationale d’art de Paris) obtenu en 2021. Mariem Memni développe le chata, une pratique invisuelle qu’elle a elle-même inventée, définie comme un « processus de conversion de l’énergie négative vers l’énergie positive qui garantit l’harmonie au sein d’un groupe ». Elle mène également une pratique intitulée lifeformance, une forme de performance à l'échelle de la vie qui considère la vie dans son ensemble comme un processus artistique. Par ailleurs, Mariem Memni a créé une nouvelle discipline, la migrologie, qui considère le migrant comme un artiste potentiel capable de transformer sa vie de migrant en œuvre d’art. L’EEIMA repose sur la conviction que l’art invisuel peut jouer un rôle crucial dans l'intégration et l'émancipation des migrants. Au sein de l’EEIMA, l'artiste a élaboré une « échelle de l’adaptation », une grille permettant de mesurer l’adaptation ou l’inadaptation du migrant à son contexte d’insertion. Le dernier article mentionnant Mariem Memni, intitulé L’artiste invisuel comme citoyen expérimental, par Audrey Poussines, a été publié dans la revue Étapes en mai 2024.

 

  Ghislain Mollet-Viéville
Conférencier

Agent d’art-conseil, critique d’art, expert honoraire près la Cour d’Appel de Paris et membre de l’Association Internationale des Critiques d’Art (AICA), Ghislain Mollet-Viéville est l'un des collaborateurs les plus actifs de la Biennale de Paris et de la Revue de Paris. Pour défendre les pratiques artistiques sortant des cadres traditionnels, il a initié la profession d’agent d’art, visant à gérer l’art dans ses rapports avec la société.
Depuis 1994, son appartement de la rue Beaubourg (occupé entre 1975 et 1992) a été reconstitué à l’identique et est présenté en permanence, avec sa collection d’art minimal et conceptuel, au Musée d’Art Moderne et Contemporain de Genève (Mamco). Ghislain Mollet-Viéville fait intervenir différentes instances au sein de notre société pour mettre à jour les modalités de production, de diffusion, d’acquisition et d’actualisation d’œuvres dont l’originalité demande des principes inédits de présentation et d’activation. Avec lui, l’objet d’art n’est plus l’objet de l’art ! Dans ses actions, la question du statut de l’art, tant sur le plan matériel qu’intellectuel, est largement prise en compte pour les interprétations des œuvres en fonction d’un temps et d’un lieu donné.

 

  Yosr Mahmoud
Conférencière

Matriartiste invisuelle, diplômée d'un master de l'ISBAS (Institut Supérieur des Beaux-Arts de Sousse, Tunisie) et praticienne-chercheuse à l’ENDA (École nationale d’art de Paris) – session XXIV, 2023-2024. Elle développe l’Esthétique de l’hospitalité, un ensemble de pratiques de l’accueil et de la convivialité. Cette esthétique transcende l’œuvre d’art et jette les bases d'une catégorie à part entière dans l'art invisuel, basée sur l'hospitalité. L’artiste a introduit le terme matriartiste pour mettre en avant les femmes artistes mères dans un univers où le patriarcat domine. Engagée, Yosr Mahmoud explore son identité généalogique, puisant ses sources dans les vertus de son héritage ancestral. Maurice Blanchot affirme dans Sublime parole que « L’hospitalité consiste moins à nourrir l’hôte qu’à lui rendre le goût de la nourriture en le rétablissant au niveau du besoin, dans une vie où l’on peut dire et supporter d’entendre dire : Et maintenant, n’oublions pas de manger ». Sa dernière conférence sur l’Esthétique de l’hospitalité s’est déroulée dans le cadre du festival culturel national en Tunisie (Sousse), JEPTAV 2024 – L’art invisuel : champs d’application et d’implication.


Conférence par Yosr Mahmoud : L'esthétique de l'hospitalité comme mode opératoire matriartistique.

Date : Mardi 15 octobre 2024 à 13:30 (heure Beyrouth)
Lieu : En hybride à l'Académie Libanaise des Beaux-Arts
Public : Étudiants en ARC Art Invisuel


La conférence présente l'esthétique de l'hospitalité comme une pratique d'art invisuel étroitement liée à l'éthique et à l'esthétique, qui se situe au cœur de la démarche matriartistique. Cette approche rassemble des artistes enracinés dans leur héritage culturel et matrimonial, mettant en lumière des activités quotidiennes souvent négligées en tant que formes d'art à part entière.

Les gestes de soin, d'accueil ou de partage constituent le fondement du mode opératoire des matriartistes. En révélant leur dimension esthétique et éthique, ces gestes se transforment en actes créatifs. À travers ce processus, les matriartistes élèvent les pratiques domestiques et nourricières, traditionnellement perçues comme ordinaires et banales, au rang de l'art. Ces actions matriartistiques, fondées sur la générosité et la considération de l'autre, incarnent une forme d'expression artistique profondément enracinée dans l'idée d'hospitalité et de convivialité.

La conférence montre comment des traditions matrimoniales de l'hospitalité, telles que "el walima", un rituel tunisien de partage, possèdent un potentiel esthétique qui peut être réactivé dans un contexte contemporain pour contrer l'individualisme et l'hostilité. En transformant des actes ordinaires, tels que la préparation et le partage de repas, en gestes artistiques, l'esthétique de l'hospitalité redéfinit l'art comme un processus inclusif où le partage et la convivialité sont essentiels à la création. Ainsi, les frontières entre éthique et esthétique, entre art et vie quotidienne, s'effacent.

 

  Gilbert Coqalane
Conférencier

Artiste invisuel urbain, titulaire d’un DNREA de l'ENDA (École nationale d’art de Paris) obtenu en 2021, Président des éditions L’Armée Recrute, membre du Conseil d’Administration de la Fédération de l’Art Urbain et intervenant scolaire. Il est l’initiateur du mouvement Perturbationiste inauguré à Nancy en 2021 et du C.D.R.A.O. (Centre Documentation, Recherche, Application des Offensives) : un lieu permettant de créer, développer et faire la promotion de « la perturbation » et de « l’offensive » comme une action artistique. Le Perturbationisme se constitue comme le premier mouvement d’art invisuel dans l’histoire. La perturbation constitue pour l’artiste un langage artistique. La perturbation est définie comme l’action visant à perturber la réalité d’un espace public ou la perception de ses utilisateurs. Un ensemble de perturbations constitue une « offensive artistique ».

 

  Loli Tsan
Conférencière

Ayant grandi dans une famille de compositeurs, pianiste classique titulaire d'une Licence de Piano de l'Ecole Normale de Musique de Piano, ainsi que d'un doctorat de 3ème cycle de Paris IV et d’un Ph.D. en Linguistique et Littératures Romanes (Romance Linguistics and Literatures) de UCLA, Loli Tsan est professeur de littérature médiévale à la State University of New York. Elle est l’auteur d’une thèse intitulée Fragmentation et Écriture du Corps au Moyen-Âge, de nombreux articles sur la réception de la globalisation en France, sur la littérature romane du 12ème siècle et d’un ouvrage intitulé L’Art à l'épreuve de la singularité. Loli Tsan a présenté les différents aspects de sa recherche dans de nombreuses conférences dans diverses universités aux États-Unis, en Chine, au Brésil, en Tunisie, et à travers l'Europe en France, en Grèce, en Italie et en Belgique. Sa recherche actuelle s’applique à la Musique au-delà du Son et aux parallèles entre l’art invisuel et la désintégration sonore en musique. En collaboration avec Alexandre Gurita, elle travaille à l'enregistrement d'une série de cours sur la dématérialisation de la musique pour l'Enda Autonome (la version en ligne de l'École nationale d'art de Paris).

 

 

 

 


Partenaires projet

MACAM accueille les participants de cet ARC dans une résidence d'art à Alita (Byblos), Liban. L'ENDA offre de la visibilité supplémentaire en termes de communication et propose une bourse à un étudiant du Master pour intégrer son programme en tant que boursier.
La Biennale de Paris offre de la visibilité supplémentaire en termes de communication et invite des personnalités du domaine de l'art à participer à une table ronde dans le cadre de cet ARC. Elle invite des étudiants de cet ARC à participer à des actions qu’elle organise.
La Revue de Paris offre aux étudiants de cet ARC la possibilité de publier un texte dans la revue s’il s’inscrit dans sa ligne éditoriale et après validation par son Comité de lecture.

 

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